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Faire une place à l’Union européenne dans la réforme constitutionnelle : 5 propositions pour le nécessaire renouveau de la contribution citoyenne [Note #16]

Docteure en droit public

Jusqu’à ce jour, les projets et propositions de réforme de nos institutions ont éludé un acteur pourtant essentiel dans notre système politique : l’Union européenne (l’UE). Or, si l’un des objectifs affichés par le Gouvernement Philippe consiste à restaurer le lien de confiance entre les citoyens et leurs institutions, à les « réconcilier avec la politique », omettre la part européenne de la question n’aurait guère de sens.

          D’une manière générale, la plupart des révisions constitutionnelles relatives à l’UE ont procédé de la seule nécessité de mettre en adéquation notre texte fondamental avec les nouvelles avancées de la construction européenne négociées dans le cadre des traités européens. C’est en effet à la suite de la décision du Conseil constitutionnel concernant l’incompatibilité du Traité de Maastricht avec notre norme fondamentale que le constituant a créé, en 1992, un nouveau titre XV dans la Constitution, plusieurs fois modifié depuis, et désormais intitulé « De l’Union européenne ».

          Mais, au-delà d’une simple « mise en conformité », le constituant de 1992 avait profité de l’occasion pour ajouter des dispositions répondant à des considérations plus politiques ou institutionnelles, à l’instar de l’article 88-4 (sur la participation du Parlement français au processus décisionnel européen) ou de l’article 88-5 (sur les modalités de ratification par la France d’un traité d’adhésion d’un État à l’Union européenne). Et si ces deux dispositions ont été réaménagées par la révision du 21 juillet 2008[1]Ainsi le Constituant a-t-il précisé à l’article 88-4 les modalités d’information du Parlement par le Gouvernement et celles du vote des résolutions. Il a en outre institué une … Continue reading, l’ample volonté de moderniser les institutions de la Vème République n’avait pas pleinement pris en considération tous les enjeux de la participation de la France à l’Union européenne[2]J. RIDEAU, « La place de l’Europe dans la révision constitutionnelle », La Semaine Juridique Édition Générale, 30 Juillet 2008, n° 31-35..

          Aujourd’hui encore, le risque est grand de reproduire un rendez-vous manqué avec l’Europe à l’occasion de cette nouvelle révision : car, en dépit d’un discours volontiers pro-européen du Président de la République, le sujet n’a jamais été évoqué dans son aspect constitutionnel.

 Pourtant, il y a matière à réformer, en France, pour rapprocher le citoyen de la prise de décision politique et susciter son adhésion. Il s’agit, non de proposer des changements du système institutionnel de l’Union européenne – projet qui nécessite des réflexions menées en commun avec nos partenaires européens -, mais de réformer au niveau national ce qui doit l’être pour améliorer le lien citoyen avec l’UE.

Un horizon : faire vivre la citoyenneté européenne en France

L’article 10 du Traité sur l’Union européenne assure que « le fonctionnement de l’Union est fondé sur la démocratie représentative », laquelle s’appuie sur :

  • la représentation directe des citoyens « au niveau de l’Union, au Parlement européen » (par le biais notamment de l’élection des eurodéputés au suffrage universel direct) ;
  • la représentation des Etats membres « au Conseil européen par leur chef d’État ou de gouvernement, et au Conseil par leurs gouvernements, eux-mêmes démocratiquement responsables, soit devant leurs parlements nationaux, soit devant leurs citoyens »[3] Dans les faits, lorsque le Conseil européen doit prendre une décision sur les orientations générales et la direction de l’Union européenne, la France exprime et défend une position par le … Continue reading.

Certes, le premier niveau de légitimité, paneuropéen, peine à trouver une véritable résonnance politique tant l’existence d’un « demos européen » demeure insaisissable[4]Voir par exemple le dossier de la Revue de l’Union européenne « « Peuple ou Peuples européen(s) » ? Le peuple européen introuvable. Recherche jurisprudentielle et … Continue reading (l’abstention aux élections européennes constitue sans doute l’une des preuves des failles du sentiment d’appartenance à une communauté politique européenne). Toutefois, si déficit démocratique il y a, les torts sont à partager entre les instances nationales et européennes. L’Union ne peut donc endosser seule la charge des reproches formulés tant les chefs d’États et de gouvernements, leurs représentants (notamment le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) et la Représentation permanente de la France à Bruxelles, ou encore les Commissaires européens) sont impliqués à toutes les étapes du processus décisionnel. De fait, affirmer que les politiques et les lois françaises sont imposées par Bruxelles s’avère largement fallacieux quand on connaît le poids décisionnel des États dans l’Union, et particulièrement celui de la France qui, pour des raisons démographiques, historiques et politiques, incarne un élément moteur dans l’Union.

C’est pourquoi il faut au contraire assumer pleinement la place des représentants de la France à Bruxelles, porter la réflexion sur l’instauration d’un contrôle démocratique efficient de leur action et moderniser la contribution des citoyens à ce niveau. Le renouveau du lien de confiance entre les citoyens et la politique consisterait alors à ne plus se défausser sur l’Union européenne, mais à élever le niveau d’exigence démocratique avec davantage de contrôle et de participation des citoyens.

D’ailleurs, si l’on étudie la citoyenneté européenne on constate que, à l’image des institutions, elle correspond uniquement à une citoyenneté de superposition :

  • Elle bénéficie automatiquement au national d’un État membre : le citoyen français est également citoyen européen et dispose ainsi de certaines prérogatives telles que le droit de vote aux élections des députés européens, le mécanisme de l’initiative citoyenne ou le droit de pétition devant le Parlement européen[5]Articles 20 et suivants du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne.. Mais sa nature politique demeure lacunaire : il ne s’agit ni de l’équivalent d’une nationalité à une échelle européenne, ni (encore ?) de la manifestation d’une appartenance à une communauté politique européenne, à une identité commune.
  • De même, les droits politiques qu’elle procure se concrétisent essentiellement en Europe pour des individus hors de leur espace national (droit de circuler dans l’Union, droits de vote et d’éligibilité pour les élections municipales et européennes dans l’État de résidence dont le citoyen européen ne détient pas la nationalité).

Par voie de conséquence, les effets de la citoyenneté européenne et le sentiment de bénéficier de son statut ne se ressentent guère pour le citoyen français résidant en France. Toutefois, cela ne doit pas empêcher de s’appuyer sur l’existence politique du citoyen européen, même « statique » (celui qui n’est pas en mobilité dans l’Union). Au contraire – et c’est l’optique de la présente note qui s’inscrit dans le seul processus de révision constitutionnelle en France –, il convient de :

  • réfléchir davantage au rôle du citoyen français, agissant en tant que citoyen européen, auprès de ses élus français actifs dans la prise de décision politique au niveau européen (décisions ayant des répercussions évidentes en France) ;
  • et d’indiquer comment les institutions politiques nationales peuvent incarner des relais plus efficaces des préoccupations des citoyens français, lesquels sont aussi des citoyens européens.

            Pour l’heure, le mécanisme principal reste cantonné à l’élection des représentants politiques nationaux pour siéger en France ou au niveau des institutions européennes. Or, la proximité des citoyens avec leurs élus nationaux – réputée plus étroite que celle avec leurs représentants européens – plaide aussi pour ce renouvellement des responsabilités.

Dans cette perspective, si un certain nombre de mécanismes permettant la consultation et la participation du citoyen ont été introduits dans la Constitution française, il faut désormais les étendre aux questions européennes. En effet, dans un objectif de refondation démocratique du système politique, une part importante de la réflexion porte sur le rôle du citoyen français qui, dans sa relation avec les élus français, peut inciter ceux-ci à prendre des positions ou décisions, les interpeller, les contrôler, demander à ce qu’on lui rende des comptes sur les problématiques européennes.     En conséquence, deux axes, la participation et le contrôle des citoyens sur les questions européennes, demandent à être repensés dans le cadre de nos institutions.

Activer la participation démocratique dans l’élaboration des positions nationales

Pour réduire les « déficits de légitimité[6]Ainsi, pour Jürgen Habermas, « des déficits de légitimité se font sentir chaque fois que le cercle des personnes qui participent aux décisions démocratiques ne recoupe pas le cercle de ceux … Continue reading », l’une des solutions consiste à associer davantage les destinataires du pouvoir ou leurs représentants aux décisions publiques et, plus précisément ici, à l’élaboration de la position défendue par la France au sein des institutions de l’Union européenne.

L’idée n’est certes pas nouvelle : des mécanismes et des organes existent au sein de l’UE qui permettent au citoyen de dialoguer avec les institutions européennes, voire même de les interpeller : l’initiative citoyenne européenne, le droit de pétition, le médiateur européen, etc. Leur existence accroît la légitimité démocratique de l’Union européenne – objectif ambitieux – et surtout évite la défiance des destinataires du pouvoir à l’encontre des décisions édictées au niveau de l’Union européenne.

Pour autant, ces instruments rencontrent souvent des difficultés d’application. De plus, ils ne permettent pas au citoyen de percevoir clairement les différents acteurs et étapes en amont de la prise de décisions. Par conséquent, des instruments nécessitent d’être créés afin de concrétiser l’association des représentants du peuple comme des citoyens eux-mêmes à l’élaboration des positions de la France. Ceux-ci interviendraient à travers une initiative citoyenne, ou l’institutionnalisation d’une phase de consultation et de dialogue avec les citoyens.

Proposition n° 1 : introduire dans la Constitution la résolution parlementaire contraignante pour les négociations européennes

Le Parlement français dispose de certains instruments en matière de politique européenne :

  • Conformément aux traités européens, notre texte fondamental prévoit que le Gouvernement « est tenu de soumettre à l’Assemblée nationale et au Sénat, dès leur transmission au Conseil de l’Union européenne, les projets d’actes législatifs européens et les autres projets ou propositions d’actes de l’Union européenne[7]Article 88-4, 1er alinéa de la Constitution française. ».
  • De plus, chacune des chambres parlementaires peut adopter une résolution européenne. Il s’agit d’une prise de position qui peut porter sur l’un des textes transmis par le Gouvernement comme sur « tout document émanant d’une institution de l’Union européenne[8]Article 88-4, 2d alinéa de la Constitution française. ».
  • Par ailleurs, le Gouvernement est tenu de s’opposer à l’adoption définitive d’une décision par les instances européennes avant que la résolution parlementaire puisse être prise en considération.
  • Enfin, la Représentation permanente française à Bruxelles doit refuser l’inscription à l’ordre du jour du Conseil d’un texte sur lequel les assemblées n’ont pu se prononcer.

Mais dans les faits, l’impact de ces instruments reste limité et la portée d’une résolution européenne adoptée par les chambres n’est que consultative, le Gouvernement n’étant pas tenu de suivre la position votée par les parlementaires dans leur résolution. Une circulaire de 2010 précise simplement que « le SGAE ou le service de la PESC examine, en liaison avec les ministères concernés, les suites à donner aux résolutions des assemblées, eu égard à la position française. Pour les projets d’actes en cours de négociation, le SGAE ou le ministre des Affaires étrangères, s’agissant des actes de la PESC, informe les assemblées de la manière dont leurs résolutions ont été prises en compte lors de la négociation de ces actes[9]Circulaire du 21 juin 2010 relative à la participation du Parlement national au processus décisionnel européen, Annexe, IV. 1. b). ». 

La position défendue par la Représentation française au sein du Conseil de l’Union ne s’avère donc pas forcément compatible avec celle exprimée par les parlementaires. Il s’ensuit que le Parlement n’exerce qu’une influence dépendant de ses rapports de force avec le Gouvernement.

Aussi, une association accrue du Parlement à l’élaboration de la position française apparaît-elle nécessaire. Dans d’autres États membres de l’Union, lors des négociations européennes, le Gouvernement est lié par la position exprimée par le Parlement[10]Voir les cas de l’Allemagne, la Finlande, l’Autriche et la Slovaquie. Pour une analyse plus complète, se reporter à Jean-Jacques HYEST, Rapport du Sénat n° 387 du 11 juin 2008 sur le … Continue reading. En France, la question avait déjà été discutée au moment de la procédure de révision de 2008, mais le Sénat avait étonnamment rejeté « un amendement tendant à rendre ces résolutions obligatoires pour le Gouvernement[11]Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008, JORF du 24 juillet 2008. ».

De fait, l’heure est venue de modifier l’article 88-4 de la Constitution pour y introduire un nouvel instrument : la résolution parlementaire contraignante [proposition n° 1]. Subsisteraient les résolutions non contraignantes afin de permettre aux chambres de continuer à exprimer leur position sur l’ensemble des documents émanant des institutions de l’Union, mais, dans le cas où le Gouvernement aurait à transmettre une proposition d’acte législatif de l’Union, la représentation française au sein du Conseil de l’Union devrait alors reprendre et exposer la position exprimée par les parlementaires.

Proposition n° 2 : Créer un droit d’adresse citoyen afin de permettre aux citoyens de participer à l’élaboration de la position française en matière de négociations européennes

Le caractère contraignant des résolutions issues de la proposition n°1 ouvrirait la porte à un autre instrument constitutionnel illustrant le rapprochement de la prise de décision des destinataires du pouvoir : pourrait en effet advenir un mécanisme permettant aux citoyens de faire remonter aux assemblées parlementaires françaises une proposition sur la position défendue par la France au sein du Conseil de l’Union [proposition n° 2].

En ce qui concerne les conditions de forme, la proposition devrait atteindre 200 000 signatures réparties dans au moins 20 départements. Si les conditions de forme et de fond étaient remplies, cette proposition devrait obligatoirement être inscrite à l’ordre du jour des assemblées parlementaires et un rapporteur désigné.

De même, et dans la mesure où seul l’exécutif élabore aujourd’hui les positions de la France auprès des institutions européennes, l’adresse précitée pourrait être directement communiquée au Premier ministre. Une fois atteintes les mêmes conditions de forme, celui-ci devrait enregistrer officiellement l’initiative [proposition n°2 bis].

Ainsi, les citoyens nourriraient-ils directement le débat politique européen, notamment sur des sujets non-inscrits à l’agenda politique, ou apporteraient-ils un soutien politique fort pour les représentants de la France dans l’Union dans la défense d’une position.

En revanche, il paraît inopportun que ces initiatives lient les représentants de la France. Deux raisons plaident en effet pour une initiative populaire non contraignante :

  • l’importance des négociations politiques menées avec nos partenaires européens et la Commission ;
  • les dangers de manipulations populistes qui pourraient émerger.    Toutefois, le Premier ministre devrait officiellement rendre compte des suites données à ces adresses, dans un délai raisonnable, à travers une décision motivée et publique[12]S’agissant des modalités précises d’une telle pétition citoyenne au stade de l’initiative, elles pourraient largement recouvrir celles relatives à une pétition citoyenne dans un but de … Continue reading [proposition n° 2 ter].

Proposition n° 3 : Recourir plus systématiquement à la consultation citoyenne pour les sujets européens

Au-delà des mécanismes de participation d’initiative citoyenne (perçus comme les instruments les plus démocratiques dans un objectif de légitimation de l’exercice du pouvoir), les responsables politiques pourraient utiliser certains outils de consultation et de dialogue afin d’associer les citoyens à l’élaboration de la position française défendue par les représentants nationaux au sein des institutions de l’Union.

En premier lieu, un dialogue direct devrait s’instaurer entre Parlement et citoyens tout au long de la législature grâce à la création d’une Agora des citoyens [proposition n°3 bis]. Celle-ci s’organiserait autour de problématiques européennes et remplirait trois rôles complémentaires :

  • Elle représenterait un lieu de concertation physique dans lequel les acteurs (citoyens, associations et parlementaires) se rencontreraient pour dialoguer sur les politiques européennes sur la révision des traités.
  • Par ailleurs, l’Agora permettrait de recenser les différends qui se présentent sur un sujet donné et les pistes de réflexion pour les commissions parlementaires. Ces positions pourraient se retrouver dans les propositions de résolution européenne des députés.
  • Enfin, l’Agora favoriserait l’accroissement d’expertise des députés de la Commission des affaires européennes sur les dossiers qu’ils doivent traiter.

Une consultation numérique des citoyens constituerait un autre instrument démocratique [proposition n°3 ter]. Cette initiative a déjà fait l’objet de plusieurs expériences plus ou moins concluantes en France et dans d’autres États. L’illustration la plus originale correspond sans doute à l’expérience islandaise : au lieu de suivre la procédure traditionnelle de rédaction d’une Constitution, une consultation numérique a laissé une large place aux propositions du citoyen. Sans entrer dans les détails[13]Pour plus d’informations, se reporter à E. SALES, « La transformation de l’écriture de la Constitution, l’exemple islandais », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2017/4 … Continue reading, la méthode suivie a conduit à la mise en ligne d’un projet de texte constitutionnel sur le site du Conseil constitutionnel islandais. Les citoyens ont alors pu poster des commentaires et des propositions d’amendements sur le site. Ont également été utilisées d’autres plateformes telles que YouTube et Facebook afin de discuter et débattre du texte et des amendements. Ces plateformes présentent l’avantage d’être populaires et relativement bien maîtrisées par les citoyens. Les propositions d’amendements ont été validées pour certaines, rejetées pour d’autres par un vote du Conseil constitutionnel lors de réunions retransmises sur le site internet. Les modalités retenues et le processus suivi ont créé un véritable engouement.

De son côté, la France a déjà organisé plusieurs consultations numériques depuis 2015. La première portait sur la fin de vie (février 2015)[14] Voir le site de l’Assemblée nationale : http://www2.assemblee-nationale.fr/consultations-citoyennes/droits-des-malades-et-fin-de-vie/article-8., la deuxième sur la République du numérique (septembre-octobre 2015)[15] Cf. le site mis en place par le gouvernement : https://www.republique-numerique.fr, une troisième sur le projet de loi égalité/citoyenneté (mai 2016)[16] Cf. le site mis en place par le gouvernement : https://www.egalite-citoyennete-participez.gouv.fr, une autre encore sur la démocratie numérique et les nouvelles formes de participation citoyenne (octobre 2017)[17] Cf. le site de l’Assemblée nationale : … Continue reading.

Si les expériences françaises en matière de consultation numérique s’avèrent donc assez récentes et modestes, le mécanisme français constitue une base intéressante à perfectionner et enrichir au regard des précédents étrangers. Il pourrait alors intervenir dans le cadre de l’élaboration de la position française défendue au sein des institutions de l’Union européenne.

Tant au stade de l’initiative qu’au travers de la consultation, faire participer le citoyen ou ses représentants à l’élaboration de la position française contribuerait à démocratiser et à légitimer l’action de la France dans l’Union, mais également celle de l’Union.

Poursuivre cet objectif de démocratisation de l’Union à l’échelle de la France suppose en toute logique d’introduire des mécanismes de contrôle à l’initiative du citoyen ainsi que de ses représentants.

Renforcer le contrôle démocratique sur les positions nationales au sein de l’Union européenne

Contrairement aux organisations internationales classiques, la spécificité de l’Union européenne repose en partie sur le fait que les États membres ne sont pas les seuls sujets du droit de l’Union : le citoyen européen l’est également.

Or, si ce dernier incarne l’un des destinataires de la norme adoptée par l’Union européenne, il doit bénéficier de moyens de contrôle qui participent à la légitimation de l’Union. Et seule l’effectivité du droit à l’information permettra de satisfaire cet objectif, ce qui suppose d’introduire de nouvelles exigences de transparence.

Une fois avisé, le citoyen pourra alors se montrer vigilant et alerter les institutions françaises des risques de non-respect des obligations communautaires, comme des atteintes de l’Union européenne au bon exercice des compétences. 

Proposition n°4 : Reconnaître un droit à l’information et de nouvelles exigences de transparence

Actuellement, une certaine opacité entoure les positions prises par les représentants français au sein des institutions européennes. Il apparaît donc nécessaire de renforcer les exigences de transparence à ce niveau. Une telle initiative permettrait que les citoyens connaissent la prise de position de leurs élus sur les sujets les plus techniques comme les plus sensibles (perturbateurs endocriniens, glyphosate…)[18] Il importe de souligner que la Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne dispose d’un site internet, régulièrement mis à jour, sur lequel elle publie les … Continue reading.

De fait, les propositions de réformes pour une reconnaissance d’un principe constitutionnel de transparence au travers d’« un droit d’accès aux informations publiques »[19] Voir en ce sens la proposition du Président de l’Assemblée nationale F. de Rugy et du groupe de travail de l’Assemblée nationale. (ou encore d’un principe de transparence administrative[20]Celui-ci a toutefois des objectifs distincts ; voir les préconisations de Thomas PERROUD : … Continue readingdoivent prospérer dans le débat constitutionnel et pouvoir s’appliquer aux prises de position des représentants de la France dans l’Union européenne, au sein du Conseil, du Conseil européen ou dans le cadre de la comitologie [proposition n° 4 bis].

On pourrait dès lors s’appuyer sur ce principe constitutionnel pour exiger de l’exécutif qu’il publie ses positions défendues auprès des institutions de l’Union [proposition n° 4 ter], non seulement après la prise de décision commune, mais aussi antérieurement à celle-ci afin que citoyens et médias puissent espérer peser sur leurs représentants nationaux avant d’être mis devant le fait accompli[21]L’exécution des normes adoptées dans l’Union européenne est une fonction assurée par les États membres ou par l’Union européenne. Dans cette dernière hypothèse, la fonction est exercée … Continue reading.

En outre, c’est également et surtout à l’égard des positions des représentants nationaux dans le cadre de la négociation d’accords internationaux entre l’UE et des États tiers (ou une organisation internationale) qu’il convient d’envisager des moyens plus importants en matière de transparence [proposition n° 4 quater]. En effet, sans s’attarder sur l’ensemble des critiques concentrées par la négociation et l’adoption des accords commerciaux de nouvelle génération (CETA, TTIP, ALEUS…), ni d’ailleurs sur les déconvenues juridiques de la Commission[22] Cf. l’avis 2/15 du 16 mai 2017 de la Cour de justice de l’Union européenne concernant l’accord commercial entre l’UE et … Continue reading, on soulignera que nombre d’acteurs de l’Union européenne ont déploré le manque de transparence de la Commission au moment des négociations de ces accords ; ils ont également rappelé que la confiance du citoyen dépend non seulement de l’accès à l’information, mais également de sa clarté. Tel fut le cas du Comité des Régions[23]Avis du Comité européen des régions — Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, 110e Session plénière, 11-13 février 2015, 2015/C 140/02 ; et de la Médiatrice européenne[24]Décision du 6 janvier 2015 qui comportait dix suggestions adressées à la Commission ; https://www.ombudsman.europa.eu/fr/cases/decision.faces/en/58668/html.bookmark qui ont manifesté leurs regrets quant au niveau de confidentialité du mandat de négociation de la Commission, le manque d’intelligibilité et de clarté des directives de négociation. Il a ainsi été reproché à la Commission d’avoir omis de publier son mandat de négociation du TTIP, alimentant la critique désormais récurrente du déficit démocratique de l’Union.

Si l’entrée en vigueur du Livre Blanc de 2001 visait en partie à se prémunir de pareils reproches (ce document ayant notamment pour objet de responsabiliser les acteurs de l’Union et de les encadrer au travers des principes de bonne gouvernance, de transparence et de droit à l’information), force est de constater que des lacunes persistent et que la confiance du citoyen demeure fragile.

Parfaitement connu, le respect de la transparence n’est pas toujours effectif ; d’où l’importance à accorder aux outils favorisant un accès à l’information ainsi qu’aux mesures permettant de faciliter l’intelligibilité de l’action menée dans et par les institutions européennes. À cet égard, on attendrait des instances françaises qu’elles se fassent le relais de certaines informations rendues publiques par la Commission, en les traduisant et les présentant de manière pédagogique et lisible sur les sites internet officiels. Dans cette optique, pourrait être publiée une page didactique sur le mandat de négociation, une sur les étapes de négociation et une autre sur le calendrier prévisionnel.

En outre, le Gouvernement français pourrait encourager la Commission à davantage de transparence, par exemple en incitant celle-ci à divulguer de manière proactive les documents de négociation [proposition n° 4 quinquies].

Enfin, cet accès à l’information transparente doit permettre d’ouvrir le débat à d’autres acteurs, tels que les collectivités territoriales [proposition n° 4 sexies]. En effet, les accords commerciaux de nouvelle génération négociés par l’Union européenne couvrent de nombreux domaines de compétence, y compris ceux relevant des collectivités territoriales. La proximité du citoyen avec les collectivités plaide d’ailleurs en faveur d’une plus grande consultation de celles-ci.

Fondamentalement, le droit à une information transparente et intelligible doit constituer une préoccupation constante. Non seulement parce qu’il incarne un fondement de la légitimation de l’action des acteurs nationaux et européens, mais aussi parce qu’un citoyen, une institution, une association, un organe bien informé peut signaler et jouer un rôle de prévention face aux risques découlant de l’exercice du pouvoir.

Proposition n° 5 : Instaurer des mécanismes d’alertes citoyennes

À l’ère du partage de l’information, de l’accroissement des outils de démocratie directe et des actions de groupe, l’objectif d’amélioration du contrôle démocratique ne saurait paraître satisfait sans l’instauration de mécanismes permettant au citoyen d’alerter directement élus et gouvernants quant au choix de la politique européenne de la France.

Ces « alertes citoyennes » présentent l’avantage de constituer des outils de démocratie plus participative et inclusive. Elles impliquent néanmoins une connaissance pointue du fonctionnement politique et institutionnel de la part de citoyens. Elles ont vocation à intervenir à divers moments et auprès de plusieurs organes, comme détaillé ci-après.

Une alerte lancée avant la prise de décision au niveau de l’UE

Parmi les outils d’alerte des gouvernants avant la prise de décision, le droit de pétition semble le plus adéquat en ce qu’il permet d’interpeller ces représentants de manière constructive. S’il existe déjà au niveau national et européen[25]En France, le droit de pétition est défini par l’article 4 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et par les … Continue reading, son efficacité paraît incertaine et son champ d’action n’englobe pas les interpellations ou alertes des dirigeants nationaux sur les questions européennes :

  • Ainsi, la possibilité pour les citoyens français et les résidents de saisir le Conseil économique, social et environnemental (CESE) par voie de pétition est-elle restreinte aux seules questions économiques, sociales ou environnementales. À cela s’ajoute des conditions procédurales et pratiques qui font perdre à cet instrument de sa pertinence : le seuil extrêmement élevé de signatures exigées (500 000) en amoindrit la portée[26]Il faut également signaler que, lorsqu’il est saisi d’une pétition, le CESE interprète de façon assez restrictive ses compétences, de sorte qu’il déclare irrecevable un grand nombre de … Continue reading.
  • Dans le même ordre d’idées, l’Ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires prévoit la possibilité d’adresser des pétitions écrites aux parlementaires. Mais, les règlements des assemblées parlementaires ne conçoivent pas de manière très précise les conditions de recevabilité des pétitions[27]Reçues par la présidence de la chambre, elles sont enregistrées et transmises à la Commission des pétitions qui décide de la recevabilité. Dans l’hypothèse où la pétition est jugée … Continue reading. En outre, les pétitions examinées par la Commission parlementaire compétente sont rarement renvoyées à un ministre ou soumises à la chambre. Enfin, peu de citoyens sont informés de l’existence d’un tel droit de pétition.  

L’idée d’introduire un droit de pétition sur des sujets européens [proposition n° 5 bis] aurait donc le double avantage de réactiver cet instrument actuellement peu effectif tout en favorisant l’intérêt du citoyen pour l’action menée par les gouvernants français à l’échelle de l’Union européenne. Outil d’expression directe, la pétition ouvrirait la voie à une interpellation formalisée de l’exécutif. Elle pourrait en effet avoir pour objet d’alerter l’exécutif sur le danger d’une proposition d’acte par la Commission européenne dont l’adoption induirait une violation des droits fondamentaux ou des libertés de circulation, un risque pour la santé publique ou l’environnement ou encore le non-respect de la diversité culturelle. Le Gouvernement pourrait élaborer une position nationale signalant cette violation potentielle aux autres membres du Conseil de l’Union. 

Concernant les modalités de mise en œuvre de ce nouvel outil, deux éléments doivent être mentionnés :

  • En premier lieu, la pertinence de ce mécanisme reposant sur son efficacité, le quorum des signatures pour que la pétition soit recevable ne doit pas dissuader les citoyens de s’en servir.
  • En second lieu, la publicité et la transparence doivent être les principes directeurs gouvernant ce nouvel instrument et pourraient emprunter la voie d’une plateforme en ligne facilitant le dépôt et l’examen de la pétition [proposition n° 5 ter].

Une alerte dans le cadre du contrôle ex ante du principe de subsidiarité par les parlements nationaux

Le contrôle ex ante permettant aux parlements nationaux de veiller à ce que l’Union européenne respecte le principe de subsidiarité[28]Le principe de subsidiarité vise à déterminer le niveau d’intervention le plus pertinent dans les domaines de compétences partagées entre l’UE et les États membres. L’Union européenne ne … Continue reading semble, là encore, un terrain propice pour associer la participation des citoyens. En effet, les traités européens prévoient que les parlements nationaux effectuent le contrôle du respect du principe de subsidiarité par les institutions décisionnelles de l’Union. C’est dans ce cadre que l’Assemblée nationale et le Sénat français reçoivent directement les projets d’actes législatifs européens et sont invités à adopter un avis motivé s’ils estiment que l’un des projets porte atteinte au principe de subsidiarité. Si un tiers des parlements nationaux (ou un quart dans le cadre l’espace de liberté, de sécurité et de justice) s’oppose à l’élaboration d’un acte normatif, la Commission doit réexaminer le projet.

Ce nouveau pouvoir accordé aux parlements nationaux par le traité de Lisbonne permet aux parlementaires de vérifier le respect des compétences nationales, régionales ou locales par les institutions du triangle décisionnel de l’Union européenne (Commission européenne, Conseil de l’Union et Parlement européen).

Associer les parlements nationaux au contrôle de l’action de l’Union participe à la démocratisation de l’entité supranationale[29]Cependant, pour que ce moyen de contrôle se révèle efficace, ou du moins effectif, il est nécessaire que la quarantaine de parlements nationaux parviennent à une position coordonnée au sein de … Continue reading. Dans cette optique et de manière complémentaire, pourrait advenir un mécanisme afin que le citoyen européen qui détecterait une atteinte au principe de subsidiarité puisse interpeller l’Assemblée nationale et le Sénat [proposition n° 5 quater]. Dans le détail, pareillealerte devrait plus spécifiquement s’adresser à la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale ou au groupe de travail « subsidiarité » du Sénat qui s’occupent de l’examen brut des projets d’actes législatifs européens. Dans un but d’efficience et de rapidité, l’alerte du citoyen devrait transiter par une plateforme internet dédiée à cet effet [proposition n° 5 quinquies].

Une alerte dans le cadre de l’application du droit l’Union

En qualité de membre de l’Union européenne, la France doit respecter les obligations qui découlent du droit de l’Union. En vertu des principes de coopération loyale, d’effet utile du droit de l’Union et d’administration indirecte, la France doit donc appliquer et faire appliquer le droit de l’Union.

En cas de non-respect de ses obligations par la France, la Commission européenne a loisir d’ouvrir la procédure précontentieuse du recours en manquement. De son côté, le citoyen a la possibilité de déposer un recours juridictionnel (action en responsabilité, invocabilité de substitution, etc.). Pour ce faire, il doit avoir un intérêt à agir et donc démontrer que la violation du droit de l’Union par la France porte directement atteinte à ses intérêts, ce qui ne lui laisse qu’une marge d’action particulièrement étroite. Il peut aussi informer la Commission qui décidera de suites à donner dans le cadre de la procédure européenne en manquement.

Or, il arrive que la France se place en situation d’infraction ou en risque d’infraction sans nécessairement le réaliser. Un citoyen qui souhaiterait simplement alerter les institutions françaises de la violation ou du risque de violation du droit de l’Union, sans aller au contentieux, ne dispose d’aucun moyen.

On pourrait alors envisager un mécanisme d’alerte déclenché par le citoyen européen afin de combler cette lacune, d’agir de manière préventive et complémentaire par rapport aux procédures de l’Union [proposition n°5 sexies]. Un site internet dédié à l’alerte citoyenne mettrait à disposition des formulaires à remplir pour signaler une violation ou un risque de violation du droit de l’Union [proposition n°5 septies]. Une réponse publique et transparente devrait alors être apportée à ce lanceur d’alerte [proposition n°5 octies].

Le chantier de la modernisation des liens de confiance des citoyens à l’égard de l’Europe s’avère de vaste envergure. Il requiert de s’intéresser aux récents outils développés dans le cadre de la démocratie participative (notamment ceux rendus possibles par le numérique). La prochaine réforme constitutionnelle en fournirait une parfaite occasion.

Si l’ensemble des propositions de la présente note ne relèvent pas du champ constitutionnel, leur mise en œuvre nécessite une ou plusieurs dispositions générales posant les bases de cette relation novatrice entre le peuple, les instances nationales et les institutions européennes.

Ces articles pourraient rejoindre le titre XV pour en constitutionnaliser les grands axes tout en renvoyant leur concrétisation à d’autres instruments (une loi organique notamment). Dans cette optique, le texte constitutionnel poserait le principe selon lequel les représentants français agissent de manière transparente auprès des institutions de l’Union européenne, peuvent recevoir des pétitions auxquelles ils doivent donner suite ou encore qu’ils peuvent consulter les citoyens sur ces sujets.

Le succès potentiel des mécanismes avancés dépendra des modalités précises de mise en œuvre et de leur appropriation par les responsables politiques mais aussi de l’implication de la société civile. Par le biais des associations, syndicats, entreprises ou toutes autres formes de structures, il convient de susciter des débats, d’organiser des pétitions et de produire une expertise sectorielle susceptible d’interpeller et de contrôler efficacement les représentants.

Sans se bercer d’illusions sur les apports dans le fonctionnement démocratique du renforcement du rôle de la société civile, son concours favoriserait assurément la démarche. En tout état de cause, sa contribution n’aurait pas vocation à remplacer les élus, mais à servir de relais, répercuter les préoccupations des citoyens, élargir les voies de la démocratie somme toute.

 Nul doute que les représentants nationaux auprès des instances européennes bénéficieront toujours d’une position privilégiée comme intermédiaires entre la volonté du peuple français et l’Union. Il faudrait alors, comme nous l’avons esquissé à propos du Parlement français, repenser les rôles de ces différents organes pour renouveler les équilibres subtils au sein de l’exécutif et de ses services, mais aussi dans ses rapports avec le Parlement, voire avec les collectivités locales. Autant de pistes de réformes institutionnelles qui mériteraient d’autres développements afin d’élaborer les positions nationales dans le processus décisionnel européen de manière plus transparente, concertée et équilibrée.

Synthèse des propositions

Modifier le titre XV de la Constitution afin de poser le principe selon lequel les représentants français agissent de manière transparente auprès des institutions de l’Union européenne, peuvent recevoir des pétitions auxquelles ils doivent donner suite ou encore qu’ils peuvent consulter les citoyens sur ces sujets

Proposition n° 1 : introduire dans la Constitution la résolution parlementaire contraignante pour les négociations européennes

Proposition n° 2 : Créer un droit d’adresse citoyen afin de permettre aux citoyens de participer à l’élaboration de la position française en matière de négociations européennes

  • Prévoir la possibilité de communiquer directement cette adresse Premier ministre qui, dès lors que les mêmes conditions de forme seraient atteintes, devrait enregistrer officiellement l’initiative [proposition n°2 bis].
  • Prévoir l’obligation pour le Premier ministre de rendre compte des suites données à ces adresses, dans un délai raisonnable, à travers une décision motivée et publique [proposition n° 2 ter].

Proposition n° 3 : Recourir plus systématiquement à la consultation citoyenne pour les sujets européens

  • Créer une Agora des citoyens pour que s’instaure un dialogue direct entre Parlement et citoyens tout au long de la législature [proposition n°3 bis].
  • Prévoir une consultation numérique des citoyens [proposition n°3 ter].

Proposition n°4 : Reconnaître un droit à l’information et de nouvelles exigences de transparence

  • Introduire dans la Constitution « un droit d’accès aux informations publiques » et l’appliquer aux prises de position des représentants de la France dans l’Union européenne, au sein du Conseil, du Conseil européen ou dans le cadre de la comitologie [proposition n° 4 bis].
  • Sur cette base, exiger de l’exécutif qu’il publie ses positions défendues auprès des institutions de l’Union [proposition n° 4 ter].
  • Exiger la transparence concernant les positions des représentants nationaux dans le cadre de la négociation d’accords internationaux entre l’UE et des États tiers (ou une organisation internationale). Dans cette optique, pourrait être publiée une page didactique sur le mandat de négociation, une sur les étapes de négociation et une autre sur le calendrier prévisionnel [proposition n° 4 quater].
  • Encourager la Commission à davantage de transparence, par exemple en incitant celle-ci à divulguer de manière proactive les documents de négociation [proposition n° 4 quinquies].
  • Ouvrir le débat à d’autres acteurs, tels que les collectivités territoriales [proposition n° 4 sexies].

Proposition n° 5 : Instaurer des mécanismes d’alertes citoyennes

  • Prévoir un droit de pétition sur des sujets européens [proposition n° 5 bis] afin d’alerter sur les risques qu’une proposition d’acte de la commission fait peser en matière de violation des droits fondamentaux ou des libertés de circulation, de santé publique, d’environnement ou encore de non-respect de la diversité culturelle.
  • Créer une plateforme en ligne pour faciliter le dépôt et l’examen de la pétition [proposition n° 5 ter].
  • Créer un mécanisme d’interpellation citoyenne de l’Assemblée nationale ou du Sénat en cas d’atteinte au principe de subsidiarité [proposition n° 5 quater].
  • Créer une plateforme internet dédiée à cet effet [proposition n° 5 quinquies].
  • Créer un mécanisme d’alerte en cas de violation du droit de l’Union [proposition n°5 sexies].
  • Créer un site internet dédié à l’alerte citoyenne [proposition n°5 septies].
  • Apporter une réponse publique et transparente à ces alertes [proposition n°5 octies].

Notes

1 Ainsi le Constituant a-t-il précisé à l’article 88-4 les modalités d’information du Parlement par le Gouvernement et celles du vote des résolutions. Il a en outre institué une commission chargée des affaires européennes dans chaque chambre. L’article 88-5 permet désormais de recourir « à la voie du Congrès » (la procédure prévue au troisième alinéa de l’article 89) et non plus seulement à la voie référendaire pour l’adhésion d’un nouvel État membre à l’Union européenne.
2 J. RIDEAU, « La place de l’Europe dans la révision constitutionnelle », La Semaine Juridique Édition Générale, 30 Juillet 2008, n° 31-35.
3 Dans les faits, lorsque le Conseil européen doit prendre une décision sur les orientations générales et la direction de l’Union européenne, la France exprime et défend une position par le biais du Président de la République. Dans le cas où le Conseil de l’Union européenne doit prendre une décision sur un acte législatif (à l’initiative de la Commission) ou sur un acte non législatif, la position de la France peut être élaborée par le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) sous l’autorité du Gouvernement ; par la suite, le point de vue français sera défendu par la Représentation permanente de la France ou par les ministres au sein du Conseil de l’Union. Œuvrent aussi les représentants au sein des différents comités qui encadrent la Commission européenne s’agissant des actes européens d’exécution. Les parlementaires nationaux, bien qu’au second plan, se sont vu reconnaître un rôle certain depuis le Traité de Lisbonne, par exemple dans le contrôle politique du respect du principe de subsidiarité.
4 Voir par exemple le dossier de la Revue de l’Union européenne « « Peuple ou Peuples européen(s) » ? Le peuple européen introuvable. Recherche jurisprudentielle et institutionnelle », 2016, p. 436 et s.
5 Articles 20 et suivants du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne.
6 Ainsi, pour Jürgen Habermas, « des déficits de légitimité se font sentir chaque fois que le cercle des personnes qui participent aux décisions démocratiques ne recoupe pas le cercle de ceux qui subissent les conséquences de ces décisions », in J. HABERMAS, Après l’État-nation – une nouvelle constellation politique, Paris, Fayard, 2000, p. 132.
7 Article 88-4, 1er alinéa de la Constitution française.
8 Article 88-4, 2d alinéa de la Constitution française.
9 Circulaire du 21 juin 2010 relative à la participation du Parlement national au processus décisionnel européen, Annexe, IV. 1. b).
10 Voir les cas de l’Allemagne, la Finlande, l’Autriche et la Slovaquie. Pour une analyse plus complète, se reporter à Jean-Jacques HYEST, Rapport du Sénat n° 387 du 11 juin 2008 sur le projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, de modernisation des institutions de la Ve République, p. 211.
11 Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008, JORF du 24 juillet 2008.
12 S’agissant des modalités précises d’une telle pétition citoyenne au stade de l’initiative, elles pourraient largement recouvrir celles relatives à une pétition citoyenne dans un but de contrôle et d’alerte que nous proposons infra. Si les deux types de pétitions n’ont pas exactement le même objectif dans le fonctionnement démocratique (une fonction d’impulsion pour l’une, d’alerte pour l’autre), elles se déclencheraient au même moment (en amont d’une décision européenne) et sont aussi susceptibles d’obéir aux mêmes conditions formelles et procédurales.
13 Pour plus d’informations, se reporter à E. SALES, « La transformation de l’écriture de la Constitution, l’exemple islandais », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2017/4 (n° 57), p. 45-57.
14 Voir le site de l’Assemblée nationale : http://www2.assemblee-nationale.fr/consultations-citoyennes/droits-des-malades-et-fin-de-vie/article-8.
15 Cf. le site mis en place par le gouvernement : https://www.republique-numerique.fr
16 Cf. le site mis en place par le gouvernement : https://www.egalite-citoyennete-participez.gouv.fr
17 Cf. le site de l’Assemblée nationale : http://www2.assemblee-nationale.fr/qui/pour-une-nouvelle-assemblee-nationale-les-rendez-vous-des-reformes-2017-2022/democratie-numerique/secretariat/actualites-du-groupe/lancement-de-la-consultation-citoyenne
18 Il importe de souligner que la Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne dispose d’un site internet, régulièrement mis à jour, sur lequel elle publie les actualités sur l’action de la France dans les institutions européennes. Il est possible d’y retrouver les sujets importants défendus au sein de différentes sessions du Conseil de l’Union. On regrettera que ces informations ne soient pas davantage mises en avant afin que le citoyen puisse se saisir des questions débattues.
19 Voir en ce sens la proposition du Président de l’Assemblée nationale F. de Rugy et du groupe de travail de l’Assemblée nationale.
20 Celui-ci a toutefois des objectifs distincts ; voir les préconisations de Thomas PERROUD : http://blog.juspoliticum.com/2017/11/29/lencadrement-des-conflits-dinterets-dans-ladministration-de-lurgence-a-sortir-dune-vision-uniquement-punitive-par-thomas-perroud/
21 L’exécution des normes adoptées dans l’Union européenne est une fonction assurée par les États membres ou par l’Union européenne. Dans cette dernière hypothèse, la fonction est exercée par la Commission européenne selon des modalités spécifiques commues sous le nom de « comitologie ». Concrètement, des comités sont mis en place pour contrôler les actes d’exécution adoptés par la Commission européenne.
22 Cf. l’avis 2/15 du 16 mai 2017 de la Cour de justice de l’Union européenne concernant l’accord commercial entre l’UE et Singapour ;

https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2017-05/cp170052fr.pdf

23 Avis du Comité européen des régions — Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, 110e Session plénière, 11-13 février 2015, 2015/C 140/02 ;
24 Décision du 6 janvier 2015 qui comportait dix suggestions adressées à la Commission ; https://www.ombudsman.europa.eu/fr/cases/decision.faces/en/58668/html.bookmark
25 En France, le droit de pétition est défini par l’article 4 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et par les articles 147 à 151 du Règlement de l’Assemblée nationale. Au sein de l’Union européenne, tout citoyen européen a le droit d’adresser, sous la forme d’une plainte ou d’une requête, une pétition au Parlement européen sur une question relevant d’un domaine de compétence de l’Union européenne. Cela est prévu aux articles 20 et 227 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) ainsi qu’à l’article 44 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
26 Il faut également signaler que, lorsqu’il est saisi d’une pétition, le CESE interprète de façon assez restrictive ses compétences, de sorte qu’il déclare irrecevable un grand nombre de pétitions.
27 Reçues par la présidence de la chambre, elles sont enregistrées et transmises à la Commission des pétitions qui décide de la recevabilité. Dans l’hypothèse où la pétition est jugée recevable par la Commission des pétitions, elle est examinée une à deux fois par session. La commission des lois peut alors prendre trois types de décisions : le classement pur et simple de la pétition, le renvoi de celle-ci à une autre commission permanente, à un ministre ou au médiateur de la République, la soumission de la pétition à la chambre.
28 Le principe de subsidiarité vise à déterminer le niveau d’intervention le plus pertinent dans les domaines de compétences partagées entre l’UE et les États membres. L’Union européenne ne peut alors intervenir que dans les cas où son action est plus efficace que celle des États membres (à l’échelon national ou local).
29 Cependant, pour que ce moyen de contrôle se révèle efficace, ou du moins effectif, il est nécessaire que la quarantaine de parlements nationaux parviennent à une position coordonnée au sein de la Conférence des Organes Parlementaires Spécialisés dans les Affaires de l’Union des Parlements de l’Union européenne (COSAUE, ex-COSAC). Or, le système de fonctionnement de cet organe apparaît peu efficace. À cela s’ajoute le délai particulièrement restreint (8 semaines) accordé aux parlementaires pour examiner le projet et adopter un avis motivé. Une évolution du fonctionnement de cet instrument est évidemment nécessaire dans un objectif de démocratisation du contrôle de l’action de l’Union.